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Les lancinants murmures de Mars

La sonde InSight a fourni les premiers enregistrements sonores de Mars

Les capteurs à courtes périodes (SP) du sismomètre SEIS, ainsi que le capteur de pression ultrasensible de la station météorologique APSS d'InSight viennent probablement de renvoyer les premiers sons jamais captés sur la planète rouge.

Le sismomètre SEIS sur le pont de l'atterrisseur InSight le 5 décembre 2018, photographié par la caméra IDC du bras robotique (© NASA/JPL).Le sismomètre SEIS sur le pont de l'atterrisseur InSight le 5 décembre 2018, photographié par la caméra IDC du bras robotique (© NASA/JPL).

Les premiers enregistrements sonores ont été présentés par le professeur Tom Pike (Imperial College London) à l’équipe scientifique présente au Jet Propulsion Laboratory le samedi 1er décembre 2018, tôt dans la matinée. Les données ont été acquises durant la première vérification de l'état de santé du sismomètre SEIS suite à l'atterrissage spectaculaire d'InSight le 26 novembre dernier.

Après avoir été allumé, les capteurs SP ont capturés le bruit que fait le vent lorsqu’il fait vibrer les panneaux solaires flexibles d’InSight, en circulant autour de l’atterrisseur. Tout se passe comme si la sonde devenait un microphone géant : les panneaux solaires agissent un peu à la façon du tympan de l’oreille, les ondes étant transmises à travers la structure de l’atterrisseur jusqu’aux capteurs SP. Ces derniers sont sensibles à des fréquences allant jusqu’à 50 Hz, soit la limite basse de ce que l’oreille humaine est capable d’entendre (ils pourraient cependant permettre d’enregistrer des sons jusqu’à 90 Hz).

Le secteur ou l’atterrisseur InSight s’est posé est apparemment très venteux, et le grondement lancinant à basse fréquence de l’effet des masses d’air sur la sonde a un effet hypnotisant et fascinant. Il augmente considérablement le sentiment de présence. La direction des vents (du nord-ouest au sud-est) mesurée par les capteurs SP semble correspondre aux traces étonnamment régulières que les tourbillons de poussière (dust devils) laissent à la surface de Mars, et est également cohérente avec les modèles de circulation atmosphérique.

Le capteur de pression ultrasensible de la station météo APSS (placé sous la responsabilité de Don Banfield, Université Cornell) a quant à lui permis de produire d'autres données sonores, différentes de celles du sismomètre SEIS. Fonctionnant à des fréquences inférieures à celles des capteurs SP, la station météo a directement enregistré le mouvement des masses d’air. Pour être audible par l’oreille humaine, les données APSS (acquises à 10 Hz) ont été traitées et décalées vers des fréquences plus élevées par Nicolas Verdier (CNES), ce qui n’enlève rien à leur capacité d’envoûtement.

Représentation visuelle des données sonores fournies par le capteur à courte période n°3 du sismomètre SEIS (© NASA/JPL-Caltech/CNES/UKSA/Imperial College London/Oxford).Représentation visuelle des données sonores fournies par le capteur à courte période n°3 du sismomètre SEIS de la sonde InSight (© NASA/JPL-Caltech/CNES/UKSA/Imperial College London/Oxford).

Lorsqu’il sera placé à la surface de Mars et recouvert par son bouclier de protection thermique et éolien (WTS), le sismomètre SEIS ne pourra plus fournir des données sonores, les vents étant une source de bruit redoutée par les sismologues. L'activité éolienne peut effectivement interférer de manière critique avec la mission première du sismomètre, qui est d’enregistrer les plus petits déplacements du sol provoqués par des secousses sismiques pour déterminer la structure interne de Mars.

Les enregistrements de la station météorologique APSS permettront cependant de continuer à écouter l'activité de l'atmosphère autour de l'atterrisseur, de jour comme de nuit, quelque soit la saison. Cette base de données sonores, outre son intérêt scientifique, sera utilisée pour augmenter encore l’immersion dans les applications de réalité virtuelle, comme le programme VR2Mars développé par la société VR2Planets conjointement avec l’IPGP, l’IRAP et le CNES.

En 2020, le prochain rover de la NASA emportera avec lui deux véritables microphones. L’un, fourni par le Jet Propulsion Laboratory, permettra d’entendre pour la première fois les sons durant l’atterrissage. Le second, procuré par la France avec SuperCam, enregistra notamment le bruit caractéristique du laser de puissance de cet instrument lorsqu’il frappera des cibles géologiques autour du rover.

Année après année, grâce à des instruments toujours plus originaux et sophistiqués, la planète Mars se rapproche inéluctablement de nous, et notre connexion avec les environnements de ce monde étrange et fascinant se cesse de se renforcer, pour notre plus grand plaisir.

Pour aller plus loin :

  • Découvrez les sons enregistrés par InSight sur cette vidéo récapitulative de la NASA (en anglais).

Dernière mise à jour : 7 décembre 2018

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