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Les autres instruments

La sonde InSight est un observatoire de géophysique complet

Outre son sismomètre SEIS, InSight dispose d'une station météo (APSS) entièrement équipée (capteurs de température, capteurs de vent) ainsi que de trois capteurs qui seront pour la première fois installés sur Mars : le capteur de flux thermique HP3, un magnétomètre (FluxGate), et un baromètre ultra-sensible pouvant détecter des infrasons. Pour couronner le tout, le système de télécommunication sera mis à profit pour suivre très précisément la rotation de la planète et les perturbations générées sur cette dernière par le noyau liquide.

  • Un pénétrateur pour mesurer le flux thermique

    L'expérimentation HP3 (prononcer HP cube) a pour objectif de mesurer le flux de chaleur qui s'échappe aujourd'hui de l'intérieur de la planète Mars. Proposée par l'Institut de Planétologie de Berlin de l'agence spatiale allemande, elle consiste à pénétrer le sol martien sur une profondeur de 5 mètres grâce à une taupe mécanique autopropulsée, et à mesurer les variations de température avec la profondeur. Comme le sismomètre SEIS, HP3 sera déposé au sol par le bras robotique IDA de l'atterrisseur InSight.

    L'instrument HP<sup>3</sup>, avec de gauche à droite le pénétrateur, le caisson principal déployable et enfin le câble scientifique (© DLR/HP<sup>3</sup> Team)L'instrument HP3, avec de gauche à droite le pénétrateur, le caisson principal déployable et enfin le câble technique (© DLR/HP3 Team)

    Une planète qui se refroidit

    Les planètes telluriques du système solaire, qui possèdent une surface solide, sont toutes des sphères chaudes qui, lentement mais inéluctablement, se refroidissent au contact du vide spatial. En plus de l'énergie thermique acquise lors de leur formation, la majorité de la chaleur interne des petites planètes est produite par la décomposition d'atomes radioactifs, essentiellement le thorium ou l'uranium, mais aussi le potassium.

    Comme en témoignent le déplacement des continents, les éruptions volcaniques et les tremblements de terre, la planète Terre a gardé une grande vigueur géologique, en dépit de son âge déjà honorable. Née au même moment, il y a 4,5 milliard d'années, Mars a connu un destin bien différent. Sur la planète rouge, le mécanisme de tectonique de plaques, qui découpe la croûte rocheuse en plaques mobiles, ne semble pas s'être initié. Si les impressionnants cônes volcaniques que l'on peut observer à la surface de la planète rouge sont la preuve d'un passé agité, aucune bouche n'est active aujourd'hui : les derniers lacs de lave nichés dans la caldera des grands volcans semblent avoir quelques centaines de millions d'années, et les plus récentes, et très rares, coulées de lave sont datées à moins de 10 millions d'années.

    Pour aider à l'interprétation des données de HP<sup>3</sup>, des simulations numériques 3-D sont effectuées sur Terre (© Ana Plesa/DLR).Pour aider à l'interprétation des données de HP3, des simulations numériques du refroidissement de la planète Mars en 3-D sont effectuées sur Terre (© Ana Plesa/DLR).

    Enfin, le champ magnétique, autrefois global, n'est plus que l'ombre de lui-même. Il aurait disparu depuis au moins 3 milliards d'années, et seules des traces de son existence subsistent encore dans la croûte la plus ancienne de la planète. Contrairement à la Terre, Mars semble avoir perdu une grande partie de sa chaleur interne. La planète n'est-elle plus qu'une sphère froide, ou possède-t-elle encore quelque part dans ses profondeurs des réservoirs de roches proches de la fusion, ultime trace du fonctionnement d'un moteur planétaire autrefois puissant, et désormais à bout de souffle ? La détermination du budget énergétique de Mars est un objectif prioritaire pour les planétologues, et c'est là qu'intervient HP3.

    Découvrez pourquoi Mars possède des reliefs aussi importants avec la version française des vidéos "Mars en une minute" du Jet Propulsion Laboratory (© JPL-Caltech/IPGP).

    HP3

    Pour mesurer le flux thermique actuel de la planète Mars, c'est à dire la quantité de chaleur qui continue de s'échapper de sa surface pour s'évanouir dans le froid de l'espace, la sonde InSight transporte avec elle un instrument original. Baptisé HP3 (Heat Flow and Physical Properties Package), ce dernier n'est autre qu'un thermomètre très sophistiqué. Pesant environ 3 kilogrammes, HP3 est composé de plusieurs sous-systèmes :

    • Une structure métallique de support de 36 centimètres de longueur, reposant sur 4 pieds de 10 centimètres de diamètre, qui renferme la taupe ainsi que les deux cordons, rangés dans deux compartiments.

    • Une taupe capable de s'enfoncer d'elle-même dans le sol. Cette dernière possède :

      • Un dispositif électromécanique de percussion qui assure une pénétration par à-coup.

      • Un capteur d'inclinaison (STATIL), qui permettra de connaître la déviation de la taupe par rapport à la verticale durant les opérations de forage, et qui est protégé des chocs inévitables dus au mécanisme de percussion.

      • Une gaine chauffante (TEM-A) équipée de capteurs de température, qui permettra de déterminer la conductivité thermique du sol.

    • Un câble technique d'une longueur de 3 mètres, qui relie l'instrument au boîtier électronique, rangé confortablement au chaud dans un compartiment isolé thermiquement au sein de l'atterrisseur InSight.

    • Un câble scientifique de 5 mètres de long, qui connecte la taupe à la structure de support, et dont le rôle est d'acheminer à la fois l'électricité et les données. Un ensemble de quatorze capteurs de température passifs sont également soudés à intervalles réguliers sur le cordon. Enfin, des marqueurs sont positionnés de part et d'autre de l'ombilic pour permettre de suivre sa profondeur de pénétration grâce à un dispositif optique et électrique (TLM, Tether Length Monitor). La largeur de l'ombilic scientifique, 35 millimètres, est légèrement supérieure à celle du puits de forage de la taupe, ceci pour lui permettre d'épouser les parois et d'assurer un contact satisfaisant des capteurs de température avec le sol.

    • Un boîtier électronique, situé à l'intérieur de l'atterrisseur, au niveau d'un compartiment isolé de la rigueur du climat martien.

    La taupe de l'expérimentation HP<sup>3</sup> (© Max Planck Institute/DLR)La taupe de l'expérimentation HP3 (© Max Planck Institute/DLR)

    Déploiement

    Une fois la sonde InSight posée sur la plaine d'Elysium, l'instrument HP3, initialement fixé sur le pont de l'atterrisseur, sera soulevé par le bras robotique IDA IDA puis déposé à la surface de Mars, à un endroit spécifiquement choisi par les scientifiques comme convenant aux opérations de forage. Durant la manœuvre de déploiement, le câble technique se dévidera derrière l'instrument, qui restera donc connecté à l'atterrisseur InSight. Les opérations de dépose d'HP3 à la surface de Mars devraient commencer au cours du sol (journée martienne) n°44 après l'atterrissage et s'étaler jusqu'au sol 58. L'enfoncement proprement dit de la taupe dans le sol pourra alors ensuite débuter. L'instrument HP<sup>3</sup> (© DLR/HP<sup>3</sup> Team)L'instrument HP3 sera posé au sol par le bras robotique d'InSight une fois le sismomètre SEIS correctement déployé. La profondeur maximale de pénétration de la taupe, qui tire derrière elle un câble équipé de capteurs de température, est de 5 mètres (© DLR/HP3 Team)

    La profondeur maximale de pénétration d'HP3 est de 5 mètres. Théoriquement, il serait possible de tenter d'atteindre ce niveau en quelques heures, mais les ingénieurs et scientifiques vont en réalité travailler étape par étape et avancer avec une grande prudence, de manière à diminuer le plus possible les risques durant la phase cruciale du forage, et à maximiser la collecte des données scientifiques.

    La taupe sera programmée pour pénétrer le sol martien sur une profondeur de 50 centimètres avant de s'arrêter. Une pause de 48 heures sera alors effectuée pour permettre à la chaleur provoquée par la friction entre la taupe et le sol de se dégager. Des mesures de conductivité thermique auront alors lieu pendant sur une journée, avant que le forage ne puisse reprendre. A ce rythme, et dans des conditions idéales, si tout se déroule comme prévu, la limite de profondeur de 5 mètres sera normalement atteinte au bout d'un mois d'opération.

    Bien entendu, rien ne garanti que la taupe parvienne à s'enfoncer aussi loin sous la surface de Mars. Comme le savent tous ceux qui un jour ont essayé de planter des sardines avec un marteau pour dresser une toile de tente, le sol peut souvent se révéler récalcitrant. Le site d'atterrissage de la sonde InSight sur la vaste plaine d'Elysium a été choisi avec beaucoup de soin par les planétologues. De l'imagerie à haute résolution, mais également des mesures d'inertie thermique (capacité d'une surface à se refroidir plus ou moins vite) et des sondes radar ont permis de sélectionner une région ou la surface n'est ni trop meuble (pour éviter un enfoncement trop important de la sonde et des instruments) ni trop dur (ce qui empêcherait alors la pénétration d'HP3). Reste que si la progression de la taupe, pour quelques raisons que ce soit, devient très difficile, les opérations de forage seront arrêtées.

    La taupe, similaire à celle qui équipait la petite capsule britannique Beagle 2 perdue lors de son atterrissage durant la période de Noël 2003, est sans nul doute au cœur de l'instrument HP3. C'est de sa capacité à pouvoir s'enfoncer dans le sous-sol de Mars que va dépendre les retombées scientifiques de cette expérimentation. Plus la profondeur atteinte par la taupe sera importante, plus le temps de mesure nécessaire pour remplir les objectifs scientifiques assignés par la NASA sera court. La taupe d'HP<sup>3</sup> mesure environ 16 centimètres de longueur (© DLR/HP<sup>3</sup> Team)La taupe d'HP3 mesure environ 16 centimètres de longueur (© DLR/HP3 Team)

    Pour s'enfoncer dans le sol, la taupe d'HP3, qui ressemble à un stylo à bout pointu, ne va pas utiliser une vis sans fin rotative (tarière), mais un ingénieux dispositif de percussion. Une masselotte métallique, propulsée vers l'avant par un champ magnétique généré par une bobine, est ensuite ramenée en position de frappe par un ressort, et le cycle recommence. A chaque coup vers l'avant, la taupe enfoncera un peu plus son museau dans le régolite martien. Les vibrations liées aux opérations de pénétration seront bien entendues mesurées avec attention par le sismomètre SEIS, qui sera alors à l'écoute.

    En plus de son mécanisme de percussion, la taupe d'HP3 dispose d'un inclinomètre (STATIL) sensible aux changements de direction par rapport à l'horizontale. Combiné avec le dispositif de mesure de longueur du câble (Tether Length Monitor, ou TLM), l'inclinomètre va permettre de déterminer de façon absolue la profondeur de la taupe, une donnée indispensable à l'établissement des profils de température du sol. Le TLM est un capteur optique et électrique capable de compter le passage de marqueurs positionnés de part et d'autre du câble scientifique. La taupe est enfin recouverte d'une gaine chauffante (TEM-A), qui dispose de ses propres capteurs de température.

    Pour être complet, mentionnons le fait que l'expérimentation HP3 inclut un radiomètre, monté sous la plateforme de l'atterrisseur, et dirigé vers une parcelle de la surface non obstrué par les instruments déposés au sol, ou située à l'ombre de la sonde. Contrairement à ce que son nom pourrait laisser croire, le rôle de ce capteur n'est pas de mesurer les radiations qui frappent la croûte martienne, mais plus simplement le flux thermique (rayonnement infrarouge) émanant de la surface, et dont dépend sa température (les spécialistes parlent ici de température de brillance).

    Le radiomètre de l'expérimentation HP<sup>3</sup> (© NASA)Le radiomètre de l'expérimentation HP3 (© NASA)

    Premières mesures de flux thermique depuis les missions lunaires Apollo

    L'expérience HP3 va permettre d'effectuer les premières mesures de flux thermique sur une planète autre que la Terre. Pour l'instant, les seules données extraterrestres de flux thermique à notre disposition ont été obtenues sur la Lune, lors des missions Apollo 15 et Apollo 17 (les astronautes américains avaient alors manuellement utilisés des tarières pour forer la surface et pouvoir placer des sondes de température dans le sous-sol).

    En étudiant la facilité avec laquelle la vague de chaleur émanant de la gaine chauffante de la taupe va se propager dans le sol martien, les scientifiques pourront déterminer la conductivité thermique du régolite, c'est à dire la capacité plus ou moins grande du sol martien à conduire la chaleur. Les mesures devraient pouvoir s'effectuer avec une bonne précision, et cela même si la conductivité du sol s'avère très faible. L'atténuation quotidienne de la vague de température diurne fournira à HP3 une autre façon de caractériser la conductivité thermique du sol.

    La détermination des variations de température avec la profondeur, c'est à dire le gradient thermique, sera un autre paramètre important qu'HP3 va être amené à déterminer. En se frayant un chemin dans le régolite, la taupe va entraîner derrière elle un cordon ombilical, qui lui fournit du courant et lui permet de transmettre des données. Comme nous l'avons vu, ce dernier est équipé de plus d'une dizaine de capteurs de température, positionnés à intervalles réguliers, tous les 35 centimètres. Ces capteurs vont permettre de dresser un profil de l'évolution de la température avec la profondeur.

    Encore faut-il pour cela pouvoir mesurer précisément la profondeur de pénétration, sachant que la taupe peut très bien refuser de descendre de manière parfaitement verticale. Il est effectivement très probable qu'à un moment donné, elle se positionne de travers. L'inclinomètre qui équipe la taupe permettra de mesurer à tout instant son orientation dans le sous-sol, mais cela ne sera qu'une étape dans la détermination de la profondeur. Cette dernière ne pourra être connue avec précision que grâce à un second dispositif, le TLM. Ce capteur optique et électrique aura effectivement pour rôle de comptabiliser devant lui le passage de marqueurs fixés de part et d'autre de l'ombilic scientifique, au fur et à mesure que le câble se dévidera. Couplé à la connaissance de l'inclinaison, la longueur de câble déroulé derrière la taupe permettra de calculer de manière non équivoque la profondeur atteinte par cette dernière.

    Les mesures thermiques effectuées par HP3 vont permettre d'établir le flux thermique, c'est à dire la facilité avec laquelle la chaleur résiduelle de Mars parvient à quitter la planète pour aller se dissiper dans les abîmes noirs et froids de l'espace. Les théoriciens estiment que la puissance dissipée dans l'espace par la surface martienne devrait se situer entre 17 et 29 mW/m2 (à comparer au flux thermique moyen de 87 mW/m2 de notre planète la Terre). Grâce à cette information cruciale, les planétologues seront en mesure de sonder indirectement les profondeurs du globe martien. Ils pourront ainsi estimer la température du manteau martien, et placer des limites quant à l'abondance d'éléments radioactifs producteurs de chaleur que la planète rouge possède encore en son sein.

    Si le bon déroulement de l'expérimentation dépend surtout de la capacité de la taupe à se frayer un chemin dans le sol de Mars, les mesures thermiques d'HP3 seront néanmoins dans tous les cas de figure parasitées par un certain nombre de phénomènes inévitables, qui vont devoir être mesurés puis soustraits des données. L'un des plus évidents n'est autre que l'échauffement du sol avec l'arrivée du jour, puis son refroidissement durant la nuit. D'autres variations de température plus difficiles à quantifier, mais qui vont marquer de leur empreinte les informations collectées par HP3 existent, comme les variations thermiques annuelles dues au climat, ou celles liées aux variations de l'inclinaison de l'axe de rotation de la planète (variations d'obliquité, qui sont cependant moindres à l'équateur).

    Si la taupe d'HP3 parvient comme prévu à atteindre les 5 mètres de profondeur, elle ne ressentira la perturbation des températures de surface générées par les ombres de l'atterrisseur et du WTS de l'instrument SEIS qu'au bout d'une année.

    En plus des informations thermiques, la plus ou moins grande résistance du régolite face aux gesticulations de la taupe fournira d'importantes informations sur les propriétés physiques du sol martien. De nombreuses inconnues demeurent quant aux caractéristiques du sol martien, que ce soit en surface et à fortiori dans les profondeurs, où nous ne sommes encore jamais allés.

    Protection planétaire

    La planète Mars étant une cible prioritaire pour la recherche de traces de vie, passées ou présentes, les agences spatiales sont obligés de prendre un grand nombre de précautions pour éviter toute contamination avec des micro-organismes terrestres, dont les étonnantes capacités à résister aux affres d'un périple spatial ne sont plus à prouver. C'est le domaine de la protection planétaire. Desséchée, exposée au rayonnement ultraviolet nocif émis par le soleil et aux radiations cosmiques, chargée en composés toxiques comme les perchlorates, la surface martienne est un milieu par définition hostile à la vie, du moins tel que nous la connaissons. En comparaison, les profondeurs de la planète semblent plus amicales. Or c'est justement ces dernières que HP3 est censé explorer, même si ce n'est que sur quelques mètres.

    L'agence spatiale américaine a donc établi une liste de pré-requis auquel doit répondre HP3, pour réduire au maximum les risques de contamination du sous-sol de la planète rouge. Située à l'équateur, la plaine d'Elysium possède un régolite sec, libre de toute glace. Si cette dernière est présente là bas sous forme de lentilles ou de langues, c'est à des profondeurs inaccessibles à la taupe d'HP3 (bien qu'à d'autres endroits de la planète, comme dans les hautes latitudes, la glace vive peut affleurer à quelques centimètres de profondeur à peine).

    Reste que par son fonctionnement, la taupe d'HP3 va produire des bouffées temporaires de chaleur, que ce soit en forant, ou lors des mesures actives de conductivité thermique avec la gaine chauffante TEM-A. Les élévations de température devraient varier entre +10°C et +50°C, ce qui aura pour effet à certains moments de faire passer la température du sol (située initialement à environ -55°C) à une température proche de 0°C.

    L'absence de glace va empêcher HP3 de donner naissance à des poches microscopiques d'eau liquide qui pourraient remplir les pores du sol. Cependant, le sol martien du site d'atterrissage pourrait renfermer des minéraux hydratés, c'est à dire des édifices cristallins contenant dans leur structure des molécules d'eau. L'une des règles de protection planétaire édictée par la NASA stipule que l'eau éventuellement libérée par HP3 lors du forage ou des mesures actives de conductivité thermique ne doit pas permettre le déplacement de particules d'une taille égale ou supérieure à 50 nanomètres (un nanomètre étant égal à 10-9 mètre). Pour se conformer à cette contrainte, les ingénieurs ont déterminé le nombre de couches moléculaires libérées par le chauffage de la taupe, ainsi que leur évolution dans le temps. Ces films aqueux éphémères devraient s'écouler par capillarité dans toutes les directions de l'espace, mais leur épaisseur serait trop faible pour pouvoir déplacer des particules de sol aussi petites que 50 nanomètres. HP3 a donc reçu le feu vert de la part des officiers de protection planétaire.

    La taupe ne dispose pas de sa propre source d'énergie, et elle reçoit l'électricité nécessaire à son fonctionnement de l'ombilic scientifique. Il n'y a donc aucun risque qu'elle puisse se libérer d'elle-même pour s'enfoncer dans les profondeurs du sol de manière autonome. Cependant, les protocoles de protection planétaire qui seront appliqués durant l'expérimentation HP3 tentent de couvrir la totalité des cas de figure, y compris celle impliquant une rupture partielle ou totale de l'ombilic auquel est raccordée la taupe. C'est pourquoi, si durant les opérations de forage le câble scientifique qui relie la taupe à son compartiment vient à se rompre, l'alimentation de la taupe sera coupée automatiquement, et les opérations de forage cesseront immédiatement.

    Dernière mise à jour : 28 octobre 2016

  • Le magnétomètre Fluxgate (© UCLA)Le magnétomètre Fluxgate (© UCLA)

    Le premier magnétomètre à la surface de Mars

    La sonde InSight dispose d'un package instrumental complet pour caractériser l'atmosphère ainsi que les bruits électromagnétiques de l'environnement au sein duquel le sismomètre ultrasensible SEIS va fonctionner. Cet ensemble de capteurs venant en support à la mission comporte un magnétomètre, fourni par l'Université de Californie basée à Los Angeles.

    Baptisé InSight Fluxgate (IFG), ce magnétomètre sera le premier à enregistrer des données magnétiques directement depuis la surface de Mars. Sa sensibilité est de 0,1 nano Tesla.

    Dernière mise à jour : 28 octobre 2016

  • Une station météorologique complète

    Les capteurs TWINS de la station météorologique de la sonde InSight (© NASA)Les capteurs TWINS de la station météorologique de la sonde InSight (© NASA)

    Comme toute station géophysique qui se respecte, la sonde InSight est équipée d'une station météorologique complète (APSS, Auxiliary Payload Sensor Suite) dont l'objectif principal est d'aider à caractériser l'influence de l'environnement du site d'atterrissage sur les mesures effectuées par le sismomètre SEIS.

    Les sismomètres sont des appareils très sensibles, capables d'enregistrer avec une grande précision toute sorte de phénomène n'ayant rien à voir avec les tremblements du sol et la propagation des ondes sismiques. SEIS ne fait pas exception à la règle, et comme le sismomètre des sondes martiennes Viking avant lui, la moindre rafale de vent ou variation de température viendront le perturber.

    L'environnement du site d'atterrissage va donc être caractérisée de la manière la plus fine possible par une station météorologique sophistiquée, dotées de capteurs de température, d'anémomètres renseignant sur la vitesse et la direction des vents, et enfin d'un capteur de pression ultrasensible.

    TWINS

    Les capteurs TWINS (Temperature and Wind Sensors for InSight) sont très similaires aux capteurs REMS (Rover Environmental Monitoring Station) utilisées pour le rover Curiosity, qui roule depuis 2012 à l'intérieur du cratère d'impact Gale. L'un des capteurs est monté sur le pont, tandis que le second est fixé sur le bras robotique IDA derrière la caméra IDC. Deux fois par seconde, ils enregistreront la température de l'air, ainsi que la vitesse et la direction des vents, et ce durant la totalité de la durée de la mission, une année martienne soit deux années terrestres.

    Capteur de pression

    La prise d'air du capteur de pression ultrasensible de la station météorologique APSS (© NASA/JPL-Caltech/IPGP/Philippe Labrot).La prise d'air du capteur de pression ultrasensible de la station météorologique APSS sur le pont de l'atterrisseur InSight (© NASA/JPL-Caltech/IPGP/Philippe Labrot).

    Un capteur de pression ultra-sensible, capable de réagir à des variations de pression de l'ordre de la dizaine de microPascal (soit 10-7 mbars) est monté sur le pont de l'atterrisseur, sous le bouclier éolien et thermique WTS (qui sera soulevé par le bras robotique pour être déposé au-dessus du sismomètre SEIS une fois ce dernier posé à la surface).

    Perturbations atmosphériques

    Les différents sous-systèmes de la station météorologique APSS (capteurs de température, girouette, anémomètre, baromètre et magnétomètre) vont jouer un rôle crucial dans l'interprétation des données fournies par le sismomètre SEIS. Effectivement, ce dernier va être parasité par l'activité incessante de l'atmosphère martienne. La moindre rafale de vent va transmettre de l'énergie au sol, et sera donc enregistrée par le sismomètre. De la même manière, des modifications continues et très subtiles de la pression de l'air se traduiront par un tambourinage très subtil de la surface.

    Le champ de pression, qui fluctue en permanence, a pour effet, à un instant donné et sur une zone donnée, d'appuyer sur le sol (charge), ou au contraire de relâcher très légèrement son emprise (décharge). Tout se passe comme si une multitude de doigts invisibles pianotaient sur la surface martienne comme sur le clavier d'un ordinateur, déformant d'autant le sol. Grâce au capteur de pression ultra-sensible d'InSight, ces variations de pression pourront être mesurées puis retirées du signal collecté par le sismomètre SEIS. Les variations de température, suivies par les capteurs de température, seront de la même manière soustraites (décorrélées) des informations fournies par le sismomètre.

    Bien entendu, outre son rôle de support dans l'acquisition de données sismiques, la station météorologique APSS va également contribuer à améliorer notre connaissance de la météorologie et du climat martien actuel. En plus de l'étude des vents, InSight s'intéressera par exemple aux nuages d'altitude et aux brouillards de surface, au passage des tourbillons de poussière (dust devils), ou encore à l'opacité de l'atmosphère due aux particules de poussière en suspension. Sur ce sujet, la caméra IDC du bras robotique et les panneaux solaires, par l'intermédiaire de la baisse de puissance enregistrée suite à la dépose inévitable d'un film poussiéreux, seront également mis à contribution.

    Dernière mise à jour : 2 janvier 2019

  • L'expérimentation de géodésie de la sonde InSight, RISE, met à profit le système de télécommunications radio avec la Terre (© NASA)L'expérimentation de géodésie de la sonde InSight, RISE, met à profit le système de télécommunications radio avec la Terre (© NASA)

    Etudier la rotation de Mars pour en déduire son intérieur

    L'expérience de géodésie RISE ne fait pas appel à un instrument spécifique. Elle s'appuie sur le système de télécommunication de l'atterrisseur InSight, et va permettre, par ce biais, de mesurer très précisément les variations de distance entre la sonde et la Terre, dues à la rotation de la planète Mars sur elle-même.

    Mars, comme toutes les planètes du système solaire, tourne à l'image d'une toupie autour d'un axe de rotation qui passe par les pôles sud et nord. La planète rouge effectue un tour complet sur elle-même en 24 heures et 37 minutes, et son axe est incliné d'environ 25° par rapport au plan défini par son orbite autour du soleil. Rotation et inclinaison de l'axe de rotation sont donc assez semblables à ceux de notre planète, qui boucle un tour en 24 heures autour d'un axe incliné à un peu plus de 23°. D'autres planètes du système solaire s'écartent de ces valeurs et présentent des particularités étonnantes : Vénus tourne ainsi à l'envers de manière très lente (plus de 116 jours), et Uranus possède un axe de rotation qui est pratiquement parallèle au plan orbital : les pôles sont inclinés vers le Soleil, tandis que l'équateur est situé à 90° !

    La rotation des planètes est un phénomène bien connu, et même si certaines spécificités comme celles que nous venons d'évoquer dans le cas de Vénus et d'Uranus sont mal expliquées, il pourrait être tentant de le considérer comme banal. Continuer à étudier précisément la façon dont la planète Mars tourne autour de son axe de rotation a pourtant un intérêt majeur : celui de permettre d'en savoir plus sur les profondeurs de l'astre.

    Les planètes du système solaire, comme Mars et la Terre, ne sont effectivement pas des sphères rocheuses uniformes, des sortes de boules de billard cosmiques. Leur intérieur est structuré sous la forme de couches d'épaisseur et de composition différentes. Les trois plus importantes sont, depuis la surface vers le centre, la croûte, le manteau et enfin le noyau métallique.

    Si l'on prend deux sphères, l'une pleinement homogène, et l'autre possédant une structure en couches de densité différentes, et que nous les faisons tourner sur elle-même comme des toupies, nous observerons vite que les mouvements de rotation ne sont pas les mêmes. La façon dont la matière est répartie dans le volume des deux sphères (ce que les physiciens nomment le moment d'inertie) est différente, et cela rejaillit sur la rotation des objets. L'expérience peut aussi très facilement être réalisée avec un œuf dur et un œuf cru. Là encore, les deux objets ne vont pas évoluer dans l'espace de la même manière une fois mis en rotation, car la structure de l’œuf cru, qui combine liquide et solide, est différente de celle de l’œuf dur, entièrement solide.

    Précession et nutation

    L'étude fine du mouvement de rotation d'une planète sur son axe montre qu'au cours du temps, la position de ce dernier varie dans l'espace. L'axe décrit effectivement un cercle autour d'une position verticale fixe : c'est le phénomène de précession. Pour notre planète la Terre, l'axe de rotation effectue un tour complet dans le ciel tous les 25 770 ans en moyenne. C'est la valeur de la précession terrestre, dite précession des équinoxes, qui est directement liée à d'importants changement climatiques. Pour Mars, la dérive dans le ciel de l'axe de rotation est bien plus lente, et celui-ci ne parcourt un tour complet qu'au bout de 165 000 ans.

    Si l'on regarde très finement à la loupe le parcours dessiné par l'axe de rotation de la Terre ou de Mars, on s'aperçoit que celui-ci ne décrit pas un cercle parfait, mais évolue au contraire en oscillant régulièrement autour d'une position centrale. Ces très légères oscillations permettent de définir la nutation : pour parcourir complètement l'une des petites oscillations, la Terre met 18,6 années, contre moins d'une année martienne (deux années terrestres) pour la planète rouge.

    Précession et nutation de la planète Mars (© IPGP/David Ducros).En tournant sur elle-même comme une toupie, la planète Mars force son axe de rotation à décrire un cercle autour d'une position arbitraire. C'est le phénomène de précession. Ce cercle est lui-même soumis à des petites oscillations appelées nutation (© IPGP/David Ducros)

    En caractérisant très finement les paramètres de la rotation de la planète Mars sur elle-même (période de rotation, valeur de la précession et de la nutation), les géophysiciens vont pouvoir obtenir une vision plus précise de son intérieur. Pour cela, l'atterrisseur InSight a été équipé de deux antennes à gain moyen qui ressemblent un peu à des pots de yaourt évasés et qui sont fixées sur le pont. Ces antennes permettent d'établir des communications directes entre la Terre et Mars dans la bande radio X, sans passer par les satellites relais qui évoluent en orbite autour de la planète rouge (revers de la médaille, le débit devient plus faible).

    En plus d'offrir la possibilité de communiquer directement avec InSight, le signal radio émis par les antennes à gain moyen va permettre de mesurer avec une précision remarquable, à 10 centimètres près, la distance entre la Terre et Mars, grâce à la mesure de l'effet Doppler. En termes d'écoute, la sonde InSight devra simplement être suivie pendant au moins 2 heures par semaine pendant au moins une année terrestre à l'aide des antennes de 34 mètres de diamètre du réseau d'écoute de l'espace lointain (DSN) de la NASA.

    Si, entre un émetteur et un récepteur radio, la distance se met à changer, la fréquence du signal radio émis fait de même. Posée sur l'équateur martien et entraînée malgré elle par le mouvement de rotation de la planète, la sonde InSight va voir sa distance avec la Terre changer en permanence. L'expérience RISE (Rotation and Interior Structure Experiment), en suivant dans le temps l'évolution de la distance entre Mars et la Terre, va donc permettre d'étudier avec un grand luxe de détails la façon dont la planète rouge tourne sur elle-même, et les changements de direction de son axe de rotation au cours du temps (précession et nutation).

    En retour, les géophysiciens pourront en déduire ce qui se cache sous sa surface et qui est invisible aux regards, c'est à dire la répartition et la nature des masses à l'intérieur du globe planétaire (moment d'inertie). La taille et densité (donc la composition minéralogique) du noyau, ainsi que la densité du manteau pourront ainsi être approchées. La précession seule donnera accès au rayon et à la densité du noyau, mais ces deux paramètres resteront reliés, l'un évoluant en fonction de l'autre. Grâce à l'étude de la nutation, le rayon du noyau et sa densité pourront être séparées (les deux mesures devenant indépendantes l'une de l'autre). RISE devrait notamment permettre de réduire l'incertitude actuelle concernant la taille du noyau d'un facteur 10.

    La sonde InSight n'est pas la première à avoir mesuré la rotation de la planète Mars. Des expériences similaires ont été conduites en 1976 avec les sondes Viking, puis 20 années plus tard en 1997 avec la sonde Pathfinder. En 2011, une campagne de mesures a aussi été effectuée durant l'hivernage du rover Opportunity. Ces premières données ont permis de poser des limites concernant la taille du noyau métallique de Mars. Vingt ans après Pathfinder, InSight va reprendre le flambeau pour affiner notre vision de la structure interne de Mars. Les mesures de la précession seront dix fois meilleures que celles effectuées par les sondes Viking, et la durée des observations sera également étendue, d'où une amélioration de la précision.

    Dernière mise à jour : 02 mars 2018

  • Le réflecteur laser d'InSight LaRRI (Laser RetroReflector for InSight)

    L'expérimentation de géodésie LaRRI (© ASI)La sonde InSight est équipée d'un rétro-réflecteur laser léger et compact. Ce dôme de 5 centimètres de diamètre comporte 8 facettes de verre réfléchissantes (d'environ 1 cm de diamètre) permettant des mesures télémétriques par un futur orbiteur doté d'un laser (© ASI).

    Si, entre 2016 et 2018, suite au report du lancement de la mission, la sonde InSight n'a subi aucune modification majeure, un instrument a toutefois été ajouté à l'atterrisseur. Baptisé LaRRI (Laser RetroReflector for InSight), ce petit dispositif d'environ 5 centimètres de diamètre est un réflecteur laser passif composé d'une structure en aluminium sur laquelle sont serties 8 surfaces réfléchissantes en verre, usinées avec une grande précision. Le poids de ce passager supplémentaire n'est que de 25 grammes.

    En juillet 1969, les astronautes de la mission Apollo 11 avaient déposé sur la mer de la tranquillité un rétro-réflecteur pour réaliser des mesures très précises de la distance Terre - Lune, grâce à des télémètres laser basés sur Terre. D'autres dispositifs du même genre furent ensuite installés lors des missions Apollo suivantes, ainsi que par les sondes automatiques soviétiques. Ils sont toujours utilisés à l'heure actuelle.

    Le principe de ces réflecteurs est de pouvoir renvoyer un faisceau de lumière dans la même direction que celle où cette dernière est arrivée. Malgré le fait que de puissants lasers terrestres soient utilisés pour frapper ces cibles, la déperdition est très importante à cause des distances mises en jeu, de la présence de l'atmosphère terrestre et de la petite taille des réflecteurs, et en pratique, seuls quelques photons ayant réalisé l'aller-retour sont capturés sur Terre.

    Les astronomes souhaitent désormais disséminer dans tout le système solaire ce type de réflecteurs, pour former un réseau étendu. L'agence spatiale italienne (ASI) avait ainsi fourni à l'Agence Spatiale Européenne (ESA) un rétroréflecteur pour la capsule ExoMars (Schiaparelli), qui fut malheureusement perdue lors de sa descente vers la surface martienne en octobre 2016. Le report du lancement d'InSight, à la fin de cette même année, pour 2018, fut une bonne opportunité pour tenter une nouvelle dépose d'un rétro-réflecteur sur la planète rouge. Une collaboration fut signée en juillet 2017 entre l'Agence Spatiale Italienne et la NASA pour équiper l'atterrisseur InSight d'un dispositif en tout point similaire à celui de Schiaparelli. Le nouveau rétro-réflecteur fut intégré sur le pont de la sonde en août 2017, à proximité de la cible de calibration servant aux caméras techniques IDC/ICC, une place qui lui permet d'avoir une vue totalement dégagée sur le ciel.

    Le rétro-réflecteur d'InSight ne pourra réellement servir que si un satellite équipé d'un laser (altimètre laser ou laser de communication Terre - Mars) est envoyé dans le futur sur place. A ce moment-là, grâce à des tirs effectués depuis l'orbite martienne, il sera possible de connaître avec une très grande précision la position de l'atterrisseur InSight, qui servira alors de repère géodésique sur Mars. InSight permettra notamment d'améliorer sensiblement la définition du méridien 0 (l'équivalent de la ligne de Greenwich martienne), pour l'instant positionnée par convention au niveau du cratère d'impact Airy 0.

    Les rétro-réflecteurs laser offrent d'autres avantages que celui de fournir un repérage ultra-précis d'un objet déposé à la surface d'une planète. Des mesures atmosphériques (détection de composés présents à l'état de trace, étude de la teneur en poussière) sont par exemple possibles. Enfin, au-delà de ces mesures de planétologie, ces instruments permettent de réaliser des expériences de physique fondamentale, et en particulier de tester l'un des principes d'équivalence prévu dans le cadre de la relativité générale.

    Dernière mise à jour : 02 mars 2018

 

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