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Modèles de structure interne de Mars

Structure interne de Mars (vue globale)
Structure interne de Mars (vue conique)
Structure interne de Mars (vue globale)
Structure interne de Mars (vue conique)
Structure interne de Mars (vue demi sphère)
Structure interne de Mars (vue globale)

L'énigme de la structure interne de Mars

Structure interne de Mars (© NASA)Structure interne de Mars (© NASA).

Contrairement à notre planète, dont la structure interne est bien caractérisée, notre connaissance de l'intérieur des autres astres du système solaire est à ce jour très limitée. Les yeux rivés vers ces terres du ciel, les géophysiciens rêvent de pouvoir, comme ils l'ont fait pour la Terre, illuminer leurs profondeurs. Et pour eux, à cause à la fois de ses similitudes et de ses différences avec le globe terrestre, Mars est un objectif hautement prioritaire.

Pour l'instant, les seules mesures effectuées permettant de placer des contraintes sur la structure de l'intérieur martien se réduisent à la détermination de la masse et du diamètre (ce qui autorise le calcul de la densité) et d'un paramètre que les géophysiciens nomment moment d'inertie. Celui-ci, déterminé grâce à l'étude de la rotation de la planète avec l'aide des sondes posées au sol (voir l'expérimentation RISE d'InSight), donne une idée de la façon dont les masses sont distribuées à l'intérieur d'un globe planétaire.

Les sondes en orbite, sensibles à la nature très subtilement bosselée des globes planétaires et à la distribution inégale des masses (qui modifie l'intensité du champ de gravité), ont tout au plus permis de confirmer que Mars possédait les mêmes enveloppes fondamentales que la Terre, et d'estimer l'épaisseur moyenne de la croûte.

La présence d'un champ magnétique global est généralement un bon indicateur de l'existence d'un noyau métallique liquide soumis à des mouvements de convection. Cependant, dans le cas de Mars (et de Vénus), ce champ est absent.

De nombreuses incertitudes demeurent quand à la structure et à l'activité du manteau martien (© Ana Plesa/DLR).De nombreuses incertitudes demeurent quant à la structure et à l'activité du manteau martien (© Ana Plesa/DLR).Enfin, des fragments de roches éjectés de la surface d'une planète dans l'espace peuvent par chance finir par échouer sur Terre. Si elles sont ramassées et identifiées, ces pierres extra-terrestres (qui sont alors appelées météorites) peuvent fournir de précieux renseignements aux géophysiciens. Les analyses minéralogiques conduites sur les météorites martiennes ont permis d'effectuer des extrapolations sur la nature de la croûte et du manteau. Des apports importants proviennent également des mesures géochimiques effectuées depuis l'orbite par des satellites, ainsi que les analyses in-situ conduites au sol, comme celles du rover Curiosity.

Cependant, malgré les efforts entrepris pour tenter de comprendre ce qui se cache dans les profondeurs de la planète rouge, de très nombreuses inconnues demeurent. Les limites et contraintes imposées par les mesures effectuées jusqu'à présent ne permettent effectivement pas de concevoir un modèle même très simple de l'intérieur de Mars. Les dimensions et la composition exactes des enveloppes internes restent inconnues, car les mesures de gravité ne peuvent pas permettre d'aboutir à un modèle unique de la structure interne. Plusieurs solutions, parfois très différentes l'une de l'autre, sont effectivement capables d'expliquer ou de rester cohérentes avec les mesures réalisées.

L'acquisition de nouvelles informations, par la mise en oeuvre de techniques appropriées au sondage des profondeurs planétaires, comme la sismologie, est donc absolument indispensable pour faire progresser notre connaissance des mécanismes qui gouvernent la formation et l'évolution des planètes.

Pourtant, aussi paradoxal que cela puisse paraître, sur toutes les missions qui se sont posées à ce jour à la surface de Mars, seule l'une d'entres-elles, Viking 2, a permis de placer un sismomètre fonctionnel. Malheureusement, sur toute la durée de fonctionnement de l’instrument, un seul événement a pu être lié à un tremblement de Mars. Cependant, même encore aujourd’hui, 40 ans plus tard, cette hypothèse ne fait pas l’unanimité parmi la communauté scientifique, et le mystère demeure quant à la véritable nature du signal vibratoire alors enregistré.

La structure interne de Mars (© IPGP/David Ducros).La structure interne de Mars : du centre vers la périphérie, on distingue la graine, le noyau externe, le manteau, la croûte et l'atmosphère (© IPGP/David Ducros).

Mars, une planète similaire à la Terre ?

Comme nous l'avons vu dans l'article précédent, la planète Mars possède une structure interne similaire à la Terre : elle est donc organisée en trois couches distinctes : de l'extérieur vers le centre, on trouve une fine croûte rocheuse, un manteau et enfin un noyau métallique.

Les zones d'ombre apparaissent cependant très rapidement quand on tente de définir plus en détails cette structure : quel est la taille du noyau martien, et sa composition ? Est-il entièrement solidifié, encore liquide, ou est-il constitué, comme celui de la Terre, d'une graine solide entourée par une enveloppe liquide ?

Quelle est la composition du manteau martien ? Ce dernier est-il animé de mouvements de convection, ou demeure-t-il au contraire immobile, transférant la chaleur accumulée au centre de la planète vers l'extérieur par simple conduction thermique ? Existe-t-il des discontinuités majeures dans le manteau, liées à des changements significatifs de composition ?

Quant à la croûte, quelle est son épaisseur ? Est-elle homogène, ou au contraire stratifiée (lentilles de glace, alternance de strates sédimentaires et de coulées volcaniques) ? Toutes ces questions et bien d'autres sont fondamentales, car elles sont directement liées aux conditions qui ont présidé à la formation, puis à l'évolution, sur des milliards d'années, de la planète rouge. Le lien est également très fort avec l'habitabilité, c'est à dire la capacité de Mars à accueillir et à soutenir le développement d'êtres vivants.

Séquence d'évolution de la structure interne de Mars (© droits réservés)Une hypothétique séquence d'évolution de la structure interne de Mars (© droits réservés).

La croûte martienne

La première météorite martienne trouvée sur Terre, Chassigny, en 3-D (© IPGP/MNHN).La première météorite martienne trouvée sur Terre, Chassigny, en 3-D (© IPGP/MNHN).

La croûte d'une planète se forme par la fusion du matériel rocheux constituant le manteau supérieur, suivi d'une expulsion vers le haut du liquide magmatique et de sa cristallisation ultérieure par refroidissement.

Dans le détail, les mécanismes de formation des croûtes planétaires sont complexes. C'est ainsi que sur la Terre, la croûte océanique qui constitue le sous-bassement des océans se forme de manière différente de la croûte continentale, qui n'a pas la même composition, et qui est par ailleurs beaucoup plus ancienne.

La croûte martienne aurait une épaisseur variant de 30 à 100 kilomètres suivant les hémisphères, et une épaisseur moyenne de 65 kilomètres, une valeur qui la rapproche plus de la croûte continentale terrestre, alors que sa composition, basaltique plutôt que granitique, est similaire à celle de la croûte océanique terrestre. Grâce aux mesures sismiques, InSight va permettre de mesurer son épaisseur avec une précision de quelques kilomètres, et de mettre en évidence une éventuelle stratification, qui pour l'instant n'a jamais été observée.

Simulation montrant des plumes magmatiques martiennes (© droits réservés)Simulation montrant des plumes magmatiques martiennes (© droits réservés).

Autre différence fondamentale, contrairement à la Terre, dont la surface est découpée en plaques mobiles qui bougent en permanence les unes par rapport aux autres, la croûte martienne semble totalement immobile.

Tout se passe comme si la machinerie géologique en oeuvre sur Mars avait été plus simple que celle de la Terre. La planète rouge serait en effet entourée d'une plaque unique, qui forme une coque externe épaisse et rigide. Mais le mécanisme à l'origine de la formation de cette croûte monolithique demeure pour l'instant inconnu.

Sur cette question, il est possible de considérer plusieurs scénarios de formation, chacun aboutissant à une épaisseur de croûte différente, et à une efficacité particulière par rapport à la capacité de dissipation de la chaleur interne de la planète.

En admettant qu'une tectonique des plaques précoce mais éphémère se soit enclenchée sur Mars (une hypothèse controversée), la croûte martienne serait assez fine, et la planète aurait alors pu évacuer efficacement sa chaleur interne, du moins dans un premier temps.

Second cas de figure, sans fracturation de la surface lithosphérique en plaques mobiles, mais avec une convection des matériaux du manteau, la planète aurait formée une croûte immobile d'épaisseur moyenne. Dans ce modèle, dit du  "couvercle stagnant", la chaleur est évacuée correctement, bien que moins efficacement qu'avec une tectonique des plaques.

Enfin, il existe un troisième cas, qui est lié à l'apparition d'un océan de magma. Peu après son accrétion, la planète Mars était en permanence soumise à des collisions très violentes avec des astéroïdes et des corps de grandes tailles. Chauffés au rouge par l'énergie dégagée, les matériaux rocheux se seraient mis à fondre jusqu'à constituer un océan de magma, dont la profondeur n'est pas connue, mais qui a sans doute concerné une bonne partie de la planète. En refroidissant, cet océan aurait formé une croûte très épaisse, dont il reste peut-être encore des traces sur Mars.

Plus en profondeur, au niveau du manteau, un mécanisme particulier aurait pris place. La partie supérieure du manteau se serait solidifiée, formant des grumeaux de densité plus importante que les matériaux sous-jacents, plus légers. Par nature instables, ces blocs de matière auraient brusquement chuté vers le bas, provoquant la remontée du matériel situé dans les profondeurs, et enclenchant éventuellement une convection en mettant le manteau sens dessus dessous. Dans ce scénario, la croûte, très épaisse, constitue une couche isolante empêchant les échanges de chaleur avec l'extérieur. Une situation problématique, tout à fait capable, comme nous allons le voir plus bas, de faire disparaître le champ magnétique généré par le noyau.

La détermination précise de l'épaisseur de la croûte martienne, ainsi que la mesure du flux thermique actuel permettra de faire le tri entre les différents scénarios. Bien entendu, la réalité est sans doute plus complexe que prévue, et il est tout à fait possible que durant son histoire, qui a débuté il y a 4,5 milliard d'années, la planète Mars soit passée par plusieurs stades, qui se seraient imbriqués les uns dans les autres, et dont le décryptage risque d'être long et délicat.

Le manteau

Module de péridotite dans un basalte terrestre (© IPGP/Philippe Labrot).Module de péridotite dans un basalte terrestre (© IPGP/Philippe Labrot).

Pris en sandwich entre la croûte et le noyau, le manteau martien doit posséder une composition similaire à celui de la Terre, si l'on se réfère à la composition des météorites martiennes qui se sont abîmées sur notre planète. Il serait donc lui aussi formé de roches riches en olivine, les péridotites.

Cependant, de nombreuses questions demeurent quant à sa composition et à sa structure. Ainsi, il pourrait théoriquement accueillir une discontinuité similaire à celle existant entre le manteau supérieur et le manteau inférieur terrestre, avec un changement de phase de l'olivine. Cependant, à cause de la plus petite taille de la planète Mars et d'un champ de gravité réduit, la profondeur du manteau martien n'est peut-être pas suffisante pour permettre à cette discontinuité (absolument fondamentale sur Terre) d'exister.

Des simulations théoriques montrent que le manteau martien devrait toujours être animé de mouvements de convection, la planète Mars ayant encore suffisamment de réserves de chaleur pour alimenter un tel brassage. Cependant, contrairement à la Terre, cette convection n'est peut-être pas parvenue à homogénéiser correctement le matériel mantellique, et il est donc possible que le manteau martien soit constitué de plusieurs poches, ou réservoirs, indépendantes, n'ayant jamais été en contact les unes avec les autres. Là encore, sur ce point, les géophysiciens attendent beaucoup de la mission InSight.

Le manteau est un compartiment qui joue un rôle majeur dans l'évolution d'une planète. En fondant partiellement, le matériel rocheux du manteau donne naissance à des liquides magmatiques, qui s'infiltrent vers le haut, jusqu'à rejoindre la croûte. Là, ils peuvent donner naissance à des phénomènes volcaniques d'ampleur, qui peuvent changer les climats, où autour desquels des formes de vie peuvent apparaître et survivre. De plus, comme nous allons le voir, le manteau, en jouant un rôle d'échangeur de chaleur entre le noyau et l'extérieur, exerce également une influence énorme sur le champ magnétique planétaire.

Un objectif important d'InSight sera donc de préciser l'épaisseur, la composition, ainsi que l'organisation éventuelle en couches du manteau martien.

Noyau et champ magnétique

Tranche de 10 cm de la pallasite Glorieta Mountain (© Luc Labenne / Société Labenne Météorites)Tranche de 10 cm de la pallasite Glorieta Mountain (© Luc Labenne / Société Labenne Météorites).

Aujourd'hui, la planète Mars ne possède plus de champ magnétique global, comme celui qui entoure la Terre.

Les seules mesures effectuées depuis l'orbite par la sonde américaine Mars Global Surveyor ont montré l'existence d'une magnétisation fossile dans les roches de l'hémisphère sud, qui datent de plusieurs milliards d'années, tandis que les roches plus jeunes de l'hémisphère nord ne présentent plus aucune trace d'un champ magnétique rémanent.

Les observations effectuées semblent clairement indiquer que dans un lointain passé, peu après sa formation, Mars devait posséder un champ magnétique global, capable de protéger l'atmosphère de l'abrasion du vent solaire, et contribuant ainsi à la mise en place de conditions climatiques permettant à l'eau liquide de s'écouler. Un tel bouclier magnétique était très certainement généré par un phénomène de dynamo, c'est à dire de convection d'un liquide métallique au sein du noyau. Il y a plus de 4 milliards d'années, le noyau de Mars devait donc être partiellement ou complètement liquide, et le contraste de température existant entre le noyau et le manteau devait être suffisamment fort pour avoir pu activer ces mouvements de convection.

Aujourd'hui, ce champ magnétique a disparu, ce qui indique que quelque chose de dramatique s'est produit au centre de la planète, peu après 4 milliards d'années. A ce stade, nous pouvons nous perdre en conjectures. Il est par exemple possible que la planète se soit refroidie tellement rapidement que le noyau a fini par se figer. La couche liquide s'est mise à cristalliser, jusqu'à devenir tellement fine que les mouvements de convection se sont arrêtés, aboutissant à la disparition définitive du champ magnétique global. Dans ce cas de figure, le noyau martien serait devenu totalement solide. Au vu des données les plus récentes collectées par les satellites en orbite autour de Mars, ce n'est pas le scénario le plus probable. La réponse gravitationnelle de la planète, telle qu'observée par les sondes orbitales, tend effectivement à montrer la présence d'un état liquide. Les enregistrements du sismomètre SEIS embarqué par la mission InSight contribueront à lever cette lancinante incertitude.

Si un refroidissement massif de l'intérieur planétaire peut aboutir à la désactivation de la dynamo martienne, un autre scénario directement opposé est également plausible. Une convection ne peut effectivement se mettre en marche que s'il existe une différence suffisamment importante de température entre d'une part le centre du noyau et d'autre part sa périphérie, sa surface.

La chaleur du noyau doit effectivement être impérativement être évacuée efficacement vers le haut par le manteau pour qu'une convection puisse se mettre en place. A l'opposée, si le manteau cesse soudain de conduire efficacement la chaleur, et qu'il forme une couche isolante, le noyau ne peut plus dissiper sa propre chaleur, et les mouvements de convection qui agitaient le métal en fusion disparaissent alors, et avec eux le champ magnétique global.

Il est donc tout à fait plausible que le noyau martien puisse être totalement ou partiellement liquide, alors même que le champ magnétique a disparu depuis des milliards d'années. La situation est d'autant plus compliquée que le destin du noyau dépend non seulement des propriétés du manteau, mais également de la composition du noyau lui-même.

Découvrez ce qui se trouve à l'intérieur de Mars avec la version française des vidéos "Mars en une minute" du Jet Propulsion Laboratory (© JPL-Caltech/IPGP).

L'étude des météorites ferreuses provenant de la ceinture d'astéroïdes et ramassées sur Terre montrent que les noyaux planétaires sont principalement formés de fer mélangés à une petite quantité de nickel. Ces météorites, aussi incroyable que cela puisse paraître, seraient des fragments de noyaux métalliques de planètes mort-nées, d'astres qui avaient commencé à se former autour du Soleil et qui ont été disloqués par des collisions titanesques. Elles permettent donc de se faire une idée de la composition des noyaux qui gisent au coeur des planètes et qui de part leur position, sont totalement inaccessibles à l'expérience directe humaine.

En plus du fer et du nickel, les noyaux des planètes telluriques comme Mars et la Terre renferment également des traces d'autres éléments, comme le silicium, le soufre ou même l'hydrogène. Bien que minoritaires, ceux-ci pourraient jouer un rôle significatif dans le destin des planètes.

Les modèles géochimiques déduits de l'analyse des météorites originaires de la planète Mars (les SNC) prédisent que le noyau martien est plus riche en soufre que le noyau terrestre. Une quantité significative de cet élément aurait donc migré à l'intérieur de la planète avec le fer en fusion, et ce avec des conséquences majeures. Plus la quantité de soufre est importante, plus le noyau aura tendance à rester liquide, même avec une diminution de la température. Si le noyau martien est très soufré, il est donc possible qu'il soit encore aujourd'hui totalement liquide. Au contraire, avec une teneur en soufre faible, il serait désormais totalement ou presque totalement solidifié, le liquide métallique ayant pris en masse. L'état du noyau martien, solide et/ou liquide, dépend donc de sa composition ainsi que de l'évolution thermique de la planète, c'est à dire de l'histoire de son refroidissement.

La taille du noyau, elle aussi inconnue avec précision, est par contre liée aux conditions dans lesquelles la planète s'est formée. Elle est aussi en lien avec le déroulement de la différenciation, cette phase cruciale de la formation d'une planète où les éléments métalliques très denses se séparent de la matière rocheuse pour chuter au centre de l'astre et s'agglomérer en un noyau. En ce qui concerne ses dimensions, le noyau de Mars mesurerait 1700 kilomètres, mais sa taille réelle n'est pas connue avec exactitude : ce chiffre est estimé à 250 voire 300 kilomètres près. InSight va permettre de réduire cet intervalle d'incertitude au minimum d'un facteur 4.

La planète rouge mesurant 3389 kilomètres de rayon, le noyau occuperait un espace non négligeable de son volume interne, même s'il serait proportionnellement plus petit que celui de la Terre. Cette différence de taille réside probablement dans le fait qu'une partie du fer qui aurait pu rejoindre le noyau serait resté dans le manteau, incorporé dans des minéraux riches en fer.

En parallèle avec les mesures de dimensions, la sonde InSight va également permettre d'évaluer avec une plus grande justesse la densité du noyau, estimée pour l'instant à 7 g/cm(+/- 1 g/cm3), une densité élevée étant associée à un  noyau de faible dimension, afin de conserver la masse totale de la planète.

En permettant aux géophysiciens de déterminer avec précision la taille du noyau martien, son état et sa composition, InSight va donc faire avancer de manière significative nos connaissances sur cette enveloppe fondamentale de la planète rouge, qui porte très certainement en elle la clé du destin si particulier de cet astre mort-né.

Trois modèles de l'évolution de la structure interne de Mars

Trois scénarios d'évolution du noyau martien (© droits réservés)Trois scénarios d'évolution du noyau martien (© droits réservés).

A titre de conclusion, brossons rapidement trois modèles différents de la structure interne de Mars, tous plausibles pour l'instant aux regards des données recueillies jusqu'à aujourd'hui, et qui seront peut-être totalement chamboulés lorsque les premiers résultats du sismomètre SEIS d'InSight parviendront à la Terre.

Le premier modèle met en avant un noyau métallique riche en soufre. Après sa formation, la planète Mars aurait possédé un noyau totalement liquide, animé de mouvements de convection générateurs d'un champ magnétique global. Le manteau était lui aussi animé de mouvements de convection, mais la croûte martienne ne se serait pas fissurée en blocs mobiles, et aucune tectonique des plaques n'aurait donc pris place.

Avec le refroidissement de la planète, la convection du noyau (resté liquide) finit par s'arrêter, ce qui prive la planète Mars de champ magnétique. Au sein du manteau, les mouvements de convection ont pu éventuellement se poursuivre, mais il est également possible que la matière mantellique soit devenue elle aussi immobile au cours du temps.

Le second modèle met en scène un noyau pauvre en soufre. Mars possède alors une structure interne similaire à celle du premier modèle : une croûte constituée d'une seule plaque recouvrant la totalité de la planète et un manteau animé de mouvements de convection. Au lieu d'être totalement liquide, le noyau est constitué d'une partie externe liquide dont la convection est source d'un champ magnétique global, et d'une partie interne solide (graine), formé par cristallisation du liquide métallique initial. La différence avec le premier modèle tient au fait que suite au refroidissement de la planète, la prise en masse du noyau continue rapidement, jusqu'à ne plus laisser qu'une couche liquide trop fine pour pouvoir héberger des cellules convectives génératrices d'un champ magnétique.

Le troisième modèle, indépendant de la richesse en soufre du noyau, implique l'apparition d'un mécanisme majeur qui change la donne : une tectonique des plaques, qui permet une évacuation efficace de la chaleur interne. Dans ce modèle, la surface de la planète Mars, comme celle de la Terre, est découpée en plaques lithosphériques mobiles. Sous la croûte, le manteau est animé de mouvements de convection, qui participent au déplacement des plaques. Le noyau est composé d'une partie externe liquide convective, et d'une partie interne solide, la graine.

Suite au refroidissement efficace de l'intérieur planétaire, ou à cause d'un événement particulier comme un impact majeur, la convection mantellique cesse. Ce phénomène entraîne automatiquement l'arrêt de la tectonique des plaques, tout en ayant également une conséquence dramatique sur la convection mantellique, qui s'arrête. Par effet domino, la convection du liquide métallique du noyau externe disparaît à son tour, entraînant l'arrêt du champ magnétique global.

Le résultat final est le même pour tous les modèles, ce qui est normal, étant donné que tous les scénarios doivent aboutir à la situation finale telle que nous la connaissons : la planète Mars finit par perdre son champ magnétique protecteur. Sous l'effet érosif du vent solaire, l'atmosphère s'évanouit dans l'espace, les températures en surface plongent, l'eau liquide cesse de couler, et une désertification globale et définitive s'installe.

Dernière mise à jour : 3 octobre 2017

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