logo seis

ExoMARS

ExoMARS, l'ambitieux programme de l'Agence Spatiale Européenne

Le 16 octobre 2016, le satellite Trace Gas Orbiter large vers Mars le module Schiaparelli (© ESA/David Ducros)Le 16 octobre 2016, le satellite Trace Gas Orbiter largue vers Mars le module Schiaparelli (© ESA/David Ducros).Au début du 21eme siècle, l'Agence Spatiale Européenne (ESA) met sur pied un programme très ambitieux d'exploration du système solaire, conduits d'abord par des sondes automatiques, puis, à plus long terme, par des hommes.

Au sein de ce projet, la planète rouge joue un rôle majeur, et devient la cible de plusieurs missions, rassemblées sous le programme Aurora, qui affiche clairement la couleur. Pour l'ESA, il s'agit d'abord et avant tout de rechercher des traces de vie, fossiles ou actuelles sur Mars, avant de s'engager dans une mission de retour d'échantillons, puis de franchir la dernière étape, consistant à déposer des hommes sur l'astre rouge.

Au fil des ans, l'Agence Spatiale Européenne est progressivement amenée à revoir ses ambitions à la baisse, tandis que le programme Aurora ne cesse de se heurter à des restrictions budgétaires et des obstacles techniques, qui obligent à des remaniements fréquents.

Dans le domaine encore vierge de la sismologie planétaire martienne, l'une des options faisait particulièrement vibrer les géophysiciens. Il s'agissait de déployer sur Mars un réseau de petits modules similaires à la capsule Beagle 2, malheureusement larguée sans succès vers Mars par la première mission martienne de l'ESA en 2003, Mars Express. Chaque module de la mission BeagleNet devait embarquer un sismomètre hérité de celui équipant les stations NetLander.

ExoMARS

Finalement, c'est une autre mission, baptisée ExoMARS, qui va être favorisée. Plus orientée vers les investigations exobiologiques, elle n'ignore toutefois pas les autres disciplines, dont la sismologie.

C'est dans ce contexte que les géophysiciens proposent d'embarquer sur un module d'atterrissage une palette très complète d'instruments géophysiques. Prévue pour fonctionner pendant au moins deux ans, la station au sol devait être larguée depuis l'espace par un satellite, dont l'objectif était de se placer en orbite pour pouvoir étudier en détail l'atmosphère martienne. Le lancement était programmé pour 2013 à bord d'une fusée Ariane 5, et devait donc permettre aux planétologues de réaliser un vieux rêve : déposer un sismomètre sur Mars.

Humboldt, un ensemble de onze instruments

Connu auparavant sous le nom de GEP (Geophysical and Environmental Payload), le package statique Humboldt comportait onze instruments : outre le sismomètre, dont nous reparlerons dans un instant, on trouvait un dispositif permettant de mesurer le flux de chaleur (hérité du pénétrateur de la sonde Beagle 2 et très similaire à l'instrument HP3 d'InSight), un magnétomètre, une station météorologique complète (mesure des températures, de la pression, des vents et de l'humidité) et une expérience de géodésie qui utilisant le système de télécommunication radio.

Cette charge utile, identique à celle de la mission InSight, était en plus accompagnée de capteurs permettant la mesure des radiations et du rayonnement ultraviolet, de détecteurs de poussière, d'un instrument capable de mesurer la charge électrique de l'atmosphère, et enfin d'un radar pénétrant pour l'étude du sous-sol.

La séquence d'atterrissage du module Schiaparelli (© ESA/David Ducros)La séquence d'atterrissage du module Schiaparelli (© ESA).

Le sismomètre SEIS

Déjà nommé SEIS à l'époque, le sismomètre d'ExoMARS profitait du travail réalisé par les équipes de l'Institut de Physique du Globe de Paris sur la mission NetLander, et encore avant lui sur la mission Mars 96.

Il comportait deux pendules obliques inversés très large bande (VBB), placés dans une sphère sous vide, et similaires à ceux embarqués sur la sonde InSight. Un microsenseur large bande à courte période fait office de troisième axe, pour former un système hybride à trois axes (2 axes VBB et 1 axe SP).

D'un poids de 2,2 kilogrammes, ce sismomètre disposait d'un système de verrouillage, pour résister aux secousses violentes du lancement et de l'atterrissage.

L'annulation d'Humboldt

Le démonstrateur technologique Schiaparelli de la mission ExoMARS 2016 (© ESA/David Ducros)Le démonstrateur Schiaparelli de la mission ExoMARS 2016 (© ESA).

Pour l'Agence Spatiale Européenne, la feuille de route d'ExoMARS va s'avérer là encore difficile à suivre, et il devint nécessaire de réduire la voilure.  En 2009, avec la Preliminary Design Review (PDR) qui clôt la phase B, la mission ExoMARS est repoussée en 2016, et la charge utile Humboldt est abandonné, pour des questions techniques (en particulier des soucis de masse) et budgétaires.

Du vaste ensemble d'instruments prévu à l'origine, il ne reste plus qu'une petite station météorologique, accompagnée du capteur sensible à l'électrification de l'atmosphère martienne. Ces deux dispositifs ont pris place à bord d'une petite capsule baptisée Schiaparelli, à l'honneur du grand astronome italien Giovanni Schiaparelli, et qui a décollé en même temps que le satellite TGO au mois de mars 2016, à bord d'une fusée Proton. L'engin s'est malheureusement écrasé sur Mars le 19 octobre 2016, à cause d'un dysfonctionnement critique du logiciel de guidage.

Comme dans le cas du projet américain MESUR, qui du réseau de 16 stations bardées d'instruments initialement envisagé, s'est réduit à l'envoi d'un démonstrateur technologique où la science était pratiquement absente faute d'une capacité d'emport suffisante, les ambitions initiales du programme Aurora/ExoMARS ont du être revues de manière significative à la baisse.

Les missions qui ont la chance de partir vers Mars ont derrière elle un très long héritage, tissé de beaucoup d'amertume et d'espoirs déçus. Des objectifs, initialement planifiés pour le court terme, se voient repousser dans le futur à plusieurs décennies, sans que rien ne puisse être fait.

En décollant vers Mars avec à son bord un sismomètre, la sonde InSight va enfin accomplir un rêve prévu de longue date, qui animait déjà les géophysiciens impliqués dans les projets annulés MESUR et Netlander, ainsi que dans les missions Mars 96 (échec au lancement) et ExoMARS (retrait du sismomètre et crash du module à l'atterrissage). On le voit, la route qui conduit vers la planète rouge est tortueuse, accidentée et semée d'embûches. Ce qui rendra d'autant plus précieuses les premières données sismiques que l'on recevra de là-haut.

Dernière mise à jour : 26 octobre 2016

logo IPGP bottom

Realized by IPGP (P. Labrot)

seis-support@ipgp.fr

 

 NASA JPL - Oxford University - Imperial College London - CNES - ISAE - MPS - IPGP - ETH